Vendredi, des dizaines de milliers de chercheurs, de médecins, de professionnels de la santé, d'étudiants et d'autres défenseurs de la science ont participé à des manifestations « Stand Up for Science » (Défendons la science), principalement aux États-Unis, avec des manifestations de soutien au Canada, en Autriche, en Slovaquie et en France.
Dans plus de 120 lieux, les manifestants ont brandi des pancartes faites à la main et ont dénoncé les attaques contre la recherche scientifique, l'éducation publique et la santé publique menées par l'administration Trump. Alors que la plupart des rassemblements n'ont attiré que quelques centaines de personnes, des milliers de personnes ont manifesté à Boston, dans le Massachusetts, à Washington DC et à New York.
Ces manifestations sont motivées par l'attaque de l'administration Trump contre pratiquement toutes les activités scientifiques financées par le gouvernement fédéral, notamment la recherche sur le climat, la conservation de l'environnement, les études sur les maladies infectieuses et bien d'autres encore. Des milliers de chercheurs, en particulier parmi ceux qui travaillent à la défense de la santé publique, ont été licenciés afin de financer des réductions d'impôts pour les riches, les grandes entreprises et la guerre.
Les manifestations s'inscrivent dans un mouvement plus large de la classe ouvrière qui se développe contre l'administration Trump et ses attaques contre les droits démocratiques, ses plans de déportations massives et le démantèlement de tous les programmes sociaux aux États-Unis afin de canaliser toutes les richesses de la société vers l'oligarchie financière.
Les travailleurs et les jeunes sont particulièrement dégoûtés par les coupes budgétaires en cours au sein du ministère de la Santé et des Services sociaux (HHS), désormais placé sous les auspices du célèbre désinformateur anti-vaccins Robert F. Kennedy Jr qui met en œuvre des politiques qui favoriseront la propagation de pathogènes dangereux, notamment la grippe, la rougeole et le COVID-19.
Des journalistes du WSWS ont parlé aux manifestants lors de rassemblements organisés dans tout le pays.
À New York, un physicien théoricien appartenant à un groupe de l'université Rockefeller a déclaré qu'il travaillait au développement de thérapies à base de cellules souches. « Nous ne sommes pas assez bien payés. Mais les personnes qui risquent de souffrir des coupes budgétaires dans le domaine de la science sont les classes défavorisées. Le problème s'est cristallisé sous Trump, mais ce qui se passe politiquement est symétrique au fascisme naissant du 20e siècle. Je pense que lors de ce rassemblement aujourd'hui, il est important que nous nous concentrions sur l'attaque contre le financement de la science. La science est l'affaire de tous. Tout le monde a besoin de faire des choix rationnels concernant sa vie, les soins de santé, la justice climatique. Il en va de même pour le gouvernement. »
Une autre manifestante au rassemblement de New York a déclaré : « Il n'y a pas que les scientifiques qui doivent s'unir. C'est toute la classe ouvrière. [...] Les gens qui travaillent pour le monde, nous sommes ceux qui se soucient, et ce n'est pas, vous savez, les 1 % les plus riches. Ils ne font rien pour nous, et ce sont eux qui détiennent le pouvoir en ce moment. Et nous devons reprendre ce pouvoir. »
Contrairement à de nombreux participants, les intervenants officiels des rassemblements ont dépeint la crise actuelle comme provenant uniquement de Trump et Musk, ignorant délibérément le fait que loin de « suivre la science », ce sont les démocrates et l'administration Biden qui ont démantelé le suivi du coronavirus et encouragé la population ne plus porter le masque. Lors de chaque manifestation, y compris lors du principal rassemblement à Washington DC, les intervenants ont mis en avant la perspective sans issue de faire pression sur les démocrates en « appelant votre membre du Congrès ».
La seule présence politique qui a lutté pour une alternative aux démocrates, basée sur une évaluation scientifique de la nature de classe de la société moderne, était le World Socialist Web Site. Ses partisans ont distribué des milliers de tracts, expliquant clairement que « les scientifiques subissent le même processus de prolétarisation que les médecins, les enseignants et les autres professionnels » et que la seule façon d'avancer est de construire un mouvement socialiste révolutionnaire contre le capitalisme lui-même.
Lors de la manifestation de New York, un neuroscientifique a expliqué au WSWS : « Je travaille sur la manière dont le cerveau traite les informations sensorielles, à un niveau très fondamental. La méthode de l'administration Trump, qui consiste à aller plus vite et à casser les choses, pourrait fonctionner pour les entreprises privées, mais pas pour les NIH (National Institutes of Health). Ils comprennent mal la science. La science prend du temps. Personne ne peut dire d'où viendra la prochaine découverte. On ne peut pas faire des coupes et s'attendre à de bons résultats. Ils devraient réduire le financement des entreprises géantes, comme BP ou Citgo. S'ils s'en prennent à la science, notre économie sera plus malade.
« Cela n'a pas commencé avec Trump », a-t-elle ajouté. « Les démocrates n’ont pas été à la hauteur. Leurs politiques nous ont conduits là où nous sommes. Ils ne se sont pas concentrés sur les besoins réels, l'économie réelle, les services. Les gens sont donc en colère. »
Un chercheur en neurosciences et en biologie de Dublin, en Irlande, venu au rassemblement de New York avec un groupe de collègues chercheurs de l'hôpital Mount Sinai, a déclaré : « Nous devons être capables de nous dresser contre le fascisme. Si cette attaque contre les bourses de recherche avait eu lieu il y a quelques mois, je ne serais pas venu travailler à New York. J'espère que le gouvernement reconnaîtra que ce que nous faisons est important. Le gouvernement irlandais n'est pas aussi sévère, mais il ne finance pas grand-chose non plus. Plus ils ne financent pas, plus il y aura de vies perdues à l'avenir. »
Ali, doctorant en physique à l'université de New York et travaillant sur la science quantique, a déclaré : « La physique n'a pas encore été touchée comme la science du climat et les soins de santé, mais il est question de démanteler la loi CHIP. Nous sommes ici pour montrer notre soutien à la science. En fin de compte, il est utile de manifester et de montrer que les politiciens doivent soutenir la science. »
David, un scientifique de l'université de Californie à Riverside, a déclaré aux journalistes du WSWS présents au rassemblement de Los Angeles : « Peu importe le confort [des riches], le nombre de maisons qu'ils possèdent, le nombre de super yachts. C'est une grande compétition pour eux, tout ce dont ils ont besoin, c'est d'en avoir plus. Ils en veulent toujours plus et la planète ne peut pas le supporter. »
« Personne ne devrait être milliardaire », a déclaré Jen, une scientifique de l'université de Californie du Sud, au WSWS, ajoutant : « Notre gouvernement devrait être du peuple et pour le peuple, et nous devons faire tomber l'oligarchie. »
À Flint, dans le Michigan, un manifestant s'est exprimé sur les impacts considérables des décrets de Trump.
Je pense que tous les décrets et toutes les actions qui sont mis en place en ce moment pour démanteler tous ces systèmes ont un impact beaucoup plus large que beaucoup de gens ne le pensent. Si l’on supprime l'éducation, où votre enfant ira-t-il à l'école ? Si l'on supprime le financement de la science, comment peut-on espérer recevoir un traitement médical ?
Je pense que les gens doivent se rassembler et utiliser le pouvoir qu'ils ont. Car je pense que lorsque nous nous rassemblons, nous pouvons avoir un impact bien plus important que ce que l'on peut penser en tant qu'individu. Il ne s'agit pas d'individualisme, mais plutôt de se rassembler, de créer des communautés et de s'entraider afin de démanteler et de recréer les systèmes actuels.
Interrogée sur la crise de l'eau à Flint, qui a été provoquée par des tentatives de privatisation de l'approvisionnement en eau de la ville et qui a causé de nombreux problèmes de santé depuis plus de dix ans, elle a déclaré : « Je pense que cela montre que les systèmes sont en place pour s'occuper des systèmes. Ils ne sont pas nécessairement toujours en place pour prendre soin des gens, et beaucoup de choses sont laissées à l’abandon, ce qui est vraiment regrettable. »
« Les gens ne sont pas jetables. Et c'est vraiment bouleversant d'entendre et de voir comment les gens sont traités, parce que nous sommes traités comme si nous étions jetables. Je ne pense pas que de manière générale, quel que soit votre parti politique, je ne pense pas que ce soit ce que les gens veulent. »
Interrogée sur l'impact des tarifs douaniers proposés par Trump sur les travailleurs du Canada, du Mexique et des États-Unis et sur la possibilité d'une lutte commune des travailleurs en Amérique du Nord et à l'échelle internationale, elle a répondu : « Oh, absolument. J'ai déjà signé la carte de grève générale, donc je suis définitivement pour.»
(Article paru en anglais le 8 mars 2025)